Charles Elias Chartouni: Les aléas de l’accord nucléaire, du même au même/شارل الياس شرتوني: مخاطر الإتفاق النووي، من التماثل إلى التماثل

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شارل الياس شرتوني: مخاطر الإتفاق النووي، من التماثل إلى التماثل
Les aléas de l’accord nucléaire, du même au même
Charles Elias Chartouni/February 10/2022

L’ironie des négociations entre les États Unis et la régime iranien tient au fait qu’elles butent sur les mêmes obstacles, les non-dits qui se répètent à l’identique, les manœuvres dilatoires, et le mensonge comme vérité première de ce mode d’échanges qui vise tout sauf la communication franche, la recherche de solutions effectives, et la normalisation des rapports entre des parties adverses. En réalité, il s’agit de gagner du temps, éviter des engrenages conflictuels délétères qui risqueraient de mettre en danger la survie du régime et sa politique de déstabilisation régionale, alors que toute la trame négociatoire repose sur une hypothèse de travail préjudicielle, la dissociation des enjeux sécuritaires et stratégiques, comme ne cessent de le répéter les officiels iraniens. Ce mode opératoire rend malaisée la diplomatie américaine qui est à la recherche d’une approche d’ensemble qui se défie du double langage, des faux-semblants et du cynisme aux codifications religieuses. Or avec le régime iranien, nous avons affaire aux trois, alors que la gravité des enjeux suppose au bout du compte des engagements résolus, et un passage délibéré à l’acte.

Autrement, la partie américaine reprend la négociation à partir d’un blocage double, celui de la négociation inaugurale qui n’a pas tenu ses promesses, où le régime iranien s’est servi de l’accord pour mener à bien sa politique déstabilisatrice sur l’ensemble du Moyen Orient, louvoyer sur les régimes d’inspection, poursuivre la répression intérieure et s’interdire toute normalisation statutaire; l’autre blocage est celui de la résiliation de l’accord par l’administration Trump et ses prolongements non aboutis. L’autre difficulté de taille procède du rejet catégorique du mode opératoire en vigueur par les républicains qui guettent toute défaillance pour dérailler le processus, alors que les élections fédérales sont à quelques mois et préparent l’élection présidentielle de 2024. La marge de manœuvre de Biden est sensiblement réduite et consiste principalement à naviguer dans des eaux troubles aux écueils multiples, alors que les enjeux de la politique interne sont hautement controversés et la polarisation est à son zénith.

Les conduites à risque du régime iranien en Syrie et au Liban, directement ou par voie de procuration via le Hezbollah, sont fermement déjouées par les israéliens et laissent présager les difficultés rédhibitoires d’un accord bâclé, unilatéral ou prêtant à équivoque, car il s’agit d’un casus belli inévitable. Les manœuvres interminables de l’Iran doivent prendre fin et donner lieu à une dynamique de normalisation, où les enjeux du nucléaire militarisé doivent donner lieu à une désescalade résolue, une adhésion ferme aux solutions concertées des conflits régionaux, et une libéralisation progressive du régime à l’intérieur de l’Iran, alors que les trois scénarios remettent en question sa légitimité défaillante, sa gouvernance anachronique et non effective et une narrativité islamique largement déboutée. La quête de solution via la voie diplomatique n’est pas seulement une affaire d’État à État, mais surtout de choix internes normalisés, et de volonté d’intégration aux normes d’un ordre international libéral et démocratique créé par les États-Unis après la deuxième guerre mondiale, or il n’en est rien. Le régime islamique iranien poursuit sa politique de déstabilisation au Moyen Orient, et se donne l’illusion de participer à la création d’un contre-système international semblable à celui des autoritarismes et totalitarismes du siècle dernier, et du terreau de la nouvelle guerre froide, en intégrant son architecture inchoative, et rejoignant la mouvance, aux contours imprécis, du révisionnisme russo-chinois.